Test Judgment

Judgment – Le Droit de Frapper

"That pervert’s so fast, he could steal your underwear while you’re still wearing it !"

Prologue

Kamurocho n’est pas une ville. C’est une hallucination collective. Une tumeur lumineuse dans le bas-ventre de Tokyo. Un Disneyland pour yakuzas, escort-girls et hommes en fuite. Les ruelles suintent le sexe frelaté, les lames rouillées et les rêves déportés dans le caniveau.

C’est là que Takayuki Yagami s’est échoué, ex-avocat idéaliste devenu détective privé à mi-temps, philosophe tabasseur à plein régime. Il arpente les trottoirs comme un Raskolnikov sous kétamine, fringué comme Fonzie en pleine descente de morale. Judgment, spin-off de la saga Yakuza, se prend pour Joey mais se bat comme Bruce Lee : ça pose des questions éthiques entre deux coups de genou dans le plexus.

Il n’y a plus Kiryu, le Christ aux pectoraux. Plus de Majima, le clown démoniaque en string zébré. Ici, c’est l’ère des procès, des yeux arrachés et des drones qui puent la naphtaline numérique.


I. Un Ange Passe, Puis Défonce un Trafic d’Organes

Yagami a connu la foi. Il croyait en la justice, aux sourires des juges, aux conclusions bien tournées. Mais un jour, il innocente un homme. Et ce dernier, dans un élan malheureux de dramaturgie, assassine une femme comme on éternue dans une église. Résultat : crise existentielle. Yagami balance sa toge, chausse ses Nike de la honte, et devient un chien errant avec des poings à la place des idéaux.

Le scénario ? Un clafoutis de noirceur, à la croisée de The Wire, Les Experts Kabukicho et une dissertation d’ado gothique sur les laboratoires pharmaceutiques. Des cadavres apparaissent, vidés de leurs yeux comme des Kinder Surprise de l’horreur. Une entreprise nommée AD-9 prétend guérir Alzheimer, mais semble surtout douée pour égarer des témoins.

Yagami fouille, court, crie, frappe, doute, fume du regard, et découvre au fil des heures que la vérité n’est pas dans les dossiers, mais dans les baffes bien senties.


II. Les Vertueux Dépravés du Cabinet Genda

Loin de l’ultra-virilité mystique de Kiryu, Yagami s’entoure d’une galerie de freaks en costard. À commencer par Kaito, son acolyte : ex-yakuza, crâne comme une pastèque et fond comme une madeleine trempée dans le whisky. Il ouvre les portes avec les épaules et les conversations avec des borborygmes de tendresse virile.

Il y a aussi le cabinet Genda, où l’on croise Saori, prêtresse de l’ennui et ninja du sarcasme, Hoshino, avocat nerd qui mouille son pantalon au moindre décolleté, et le maître Genda lui-même, vieux grincheux plus utile pour commander des sushis que pour défendre une cause.

Un équipage de bras cassés, mais avec une chaleur humaine qu’on ne retrouve que dans les clubs de jazz ou les vieux épisodes de Ally McBeal.


III. Kamurocho, Mon Amour, Ma Verrue

Kamurocho, encore. Kamurocho, toujours. Increvable comme une chanson de Johnny sur un juke-box de bordel. Les rues n’ont pas changé, mais leur fonction est désormais documentaire : on y filme, on y poursuit, on y infiltre, on y tabasse. Le tout dans un ballet morbide entre CSI Tokyo et Tekken.

Les combats sont nerveux comme un lapin cocaïnomane : deux styles, mille humiliations possibles. On alterne entre le Gracieux (tourbillons, envolées de tibias) et le Brutal (coudes dans la glotte et crashs-test humains). Ça manque de la rage divine de Kiryu, mais ça fait le café, surtout quand ce café est servi dans la gueule d’un mafieux véreux.

Capture d'écran Judgment personnalisation hôtesse



IV. Les Amis Imaginaires et les Chats Sociopathes

Les quêtes annexes sont un régal de décadence. On sauve des chats qui veulent changer de prénom. On affronte un pervers masqué qui flatte les culs d’inconnues avec une souplesse olympique. On défend une idole qui rêve de devenir yakuza, ou l’inverse, ou les deux.

Chaque rencontre semble avoir été écrite par un comité de clowns dépressifs enfermés dans une cave. Et pourtant, une étrange humanité s’en dégage. On se prend d’affection pour ces éclopés, ces déviants, ces paumés qui ne demandent qu’un bol de ramen ou une baston contre l’injustice sociale.

Mention spéciale aux "amis de quartier", une mécanique qui consiste à séduire la ville un sourire après l’autre. Résultat : Kamurocho devient un Tamagotchi géant nourri à la flatterie et à la loyauté à coups de nunchakus.


V. Drones, VR et Autres Horreurs Ludiques

Course de drones : une abomination. Contrôles dignes d’un vibromasseur dysfonctionnel. Trajectoires imprévisibles. Bruits humiliants.

VR Sugoroku : imagine Monopoly, mais sur des rails, avec des cases pièges, des chaises électriques, et des jetons que même Satan refuserait de manipuler.

Le reste ? Karaoké, fléchettes, UFO catchers. Des amuse-bouches, parfois savoureux, jamais inoubliables. Il manque la grandeur d’un cabaret à gérer, d’une guerre de gangs à organiser ou d’un Majima qui surgit des toilettes pour te tester sur la maîtrise du tango mortel.


VI. Jugement Dernier

Judgment est un très bon jeu. Mais il est un très bon à côté. Un polar de luxe, riche en émotions, en tabassages légalement ambigus, en ruptures de ton et en fausses pistes. Un Tokyo noir peuplé de fantômes bureaucratiques et de démons en costard.

Mais ce n’est pas Yakuza. Il n’en a ni la mythologie, ni la folie nucléaire, ni les explosions de testostérone triste. Yagami est charismatique, certes. Mais il ne verse pas une larme en regardant le Mont Fuji en costume blanc sur fond de saxophone. Il ne hurle pas « NANI ? » en brisant une chaise sur le dos de son frère d’armes.

C’est un plat raffiné, équilibré, servi dans une assiette en porcelaine noire. Mais ce n’est pas la boucherie opératique des épisodes numérotés.


Verdict : 8/10 – La Loi, le Chaos et le Blouson de Cuir

Judgment, c’est ce flic fatigué qu’on retrouve dans les romans de Manchette ou les films de Kitano : paumé, sincère, un peu con, mais toujours prêt à cogner pour une idée morte. Un spin-off brillant, certes. Mais un spin-off quand même. Un jugement parallèle, rendu dans l’ombre des légendes.

"My virtual girlfriend doesn’t judge me, unlike real girls who hate my action figure collection !"

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